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Les trous noirs

« Trou noir » est un terme inventé par le Physicien John Wheeler en 1967, pour décrire une concentration de masse si importante que même les photons ne peuvent se soustraire à sa force gravitationnelle. Il faut savoir que les trous noirs ont été déduits à partir des équations de la relativité générale d’Einstein, et qu’on ne les a observés que bien après.

 

Sommaire du dossier

  1. Historique
  2. Formation d'un trou noir stellaire
  3. Structure d'un trou noir
  4. Les phénomènes provoqués par les trous noirs
  5. Modes de détection et preuves d'existence
  6. Bibliographie

 

1. Historique

« Trou noir » est un terme inventé par le Physicien John Wheeler en 1967, pour décrire une concentration de masse si importante que même les photons ne peuvent se soustraire à sa force gravitationnelle. Il faut savoir que les trous noirs ont été déduits à partir des équations de la relativité générale d’Einstein, et qu’on ne les a observés que bien après.

La théorie de la relativité générale est publiée en 1916 par Einstein, et, la même année, Karl Schwarzschild trouve la solution exacte des équations décrivant le champ gravitationnel produit par un corps à symétrie sphérique dans le vide. Il établit l’existence de ce qui sera appelé le rayon de Schwarzschild, limite en-deçà de laquelle apparaît une singularité mathématique : le terme du temps disparaît des équations, et l’espace tend vers l’infini… Quand Oppenheimer étudia le cas d’une étoile s’effondrant en-deçà de la limite de Schwarzschild, en négligeant la rotation de l’étoile, il obtint lui aussi un résultat étonnant : la lumière rayonnée par le cœur du noyau se décale vers le rouge (sa longueur d’onde augmente), et est de plus en plus déviée, jusqu’à ce que, une fois atteinte la limite de Schwarzschild, elle ne puisse plus échapper à la force gravitationnelle ; un trou noir est formé. Il faudra attendre les années 60, et le début de l’observation astronomique à l’aide des rayons X, pour que la théorie des trous noirs soit plus approfondie, et que les premières preuves de leur existence soient apportées.

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2. Formation d'un trou noir stellaire

Les étoiles, à la fin de leur « vie », connaissent des destins très différents, en fonction de leur masse. Le soleil, par exemple, quittera sa séquence principale pour se transformer en géante rouge, puis se contractera jusqu’à former une naine blanche. En effet, la réaction de fusion nucléaire qui a lieu dans le noyau des étoiles produit tous les élément du tableau périodique. Lorsque l’étoile brûle son hydrogène, elle est en phase principale. Lorsque tout l’hydrogène est consommé, l’étoile commence à brûler l’hélium ; elle se transforme en géante rouge. Lorsque le noyau de l’étoile n’est plus constitué que de fer, la fusion s’arrête, et, ne pouvant plus soutenir les forces de gravitation, l’enveloppe gazeuse est éjectée (phénomène de nova) ; la force gravitationnelle arrache les électrons à leurs atomes, pour former un gaz dégénéré (1010kg.m-3). La pression du gaz dégénéré compense alors la force de gravitation, et l’astre se stabilise pour former une naine blanche. Cependant, la pression du gaz dégénéré a une valeur limite, et une naine blanche a une masse inférieure à 1,5 Masses solaires; c’est la limite de Chandrasekhar.

Si le noyau a une masse supérieure à cette limite, la pression du gaz électronique ne compense plus la force gravitationnelle et le noyau continue de s’effondrer. Les électrons fusionnent alors avec les protons pour former des neutrons, qui, obéissant au principe d’exclusion de Pauli, fournissent une pression de dégénérescence suffisante pour compenser la force gravitationnelle (1018kg.m-3). Le noyau se stabilise pour former une étoile à neutrons.

Cependant si le noyau a une masse supérieure à la limite d’Oppenheimer-Volkoff (située entre 2.4 et 3.2 Masses solaires), la pression de dégénérescence baryonique ne suffit pas à compenser la force gravitationnelle. L’étoile s’effondre alors en-deçà de son rayon de Schwarzschild et devient un trou noir.

Les trous noirs sont donc formés par des étoiles de plus de 30 Masses solaires, qui s’effondrent sur elles-même sans que rien ne puisse stopper le processus.

 

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3. Structure d'un trou noir

Un trou noir est, d’abord et avant tout, une singularité : c’est l’endroit où toute la masse est condensée. Il est de la taille d’une particule, et son état ne peut être décrit avec précision, puisque l’on ne peut appliquer ni les lois de la physique relativiste, ni les lois de la physique quantique ; une trop grande masse est contenue dans un volume trop étroit.

Le plus important, de l’image que nous nous faisons d’un trou noir, est l’Horizon : C’est la sphère limite en-deçà de laquelle même la lumière ne peut sortir : elle inexorablement entraînée vers la singularité. L’Horizon a un rayon égal au rayon de Schwarzschild, solution de l’équation :

On peut obtenir une assez bonne approximation de la solution en se limitant à la théorie Newtonienne. La vitesse de libération, pour un astre de masse m vaut :

Si la vitesse d’évasion est supérieure à c (vitesse de la lumière), alors même la lumière ne peut s’échapper. D’où l’approximation Newtonienne du rayon de Schwarzschild :

Un trou noir est, de plus caractérisé par seulement trois paramètres :

  • sa masse, qui définit aussi son horizon, et donc sa « taille »
  • sa charge électrique
  • son moment angulaire.

On définit donc différents types de trous noirs théoriques :

  • Les trous noirs de Schwarzschild, sphériques sans rotation et non chargés, objets de l’étude théorique de Schwarzschild
  • Les trous noirs de Kerr, non sphériques, en rotation et non chargés,
  • Les trous noirs de Reissner Wordström, non sphériques, sans rotation, et chargés,
  • Les trous noirs de Kerr-Newman, non sphériques, en rotation et chargés.

Les trous noirs les plus étudiés sont ceux de Kerr, qui constituent le cas le plus courant, les trous noirs assez massifs atteignant obligatoirement un état de stabilité électrique.

Les trous noirs sont aussi distingués par leur taille :

  • Les trous noirs quantiques sont des objets théoriques de la taille d’une particule, supposés formés juste après le Big Bang et spécifiquement étudiés par Stephen Hawkins,
  • Les trous noirs stellaires, d’une dizaine de masses solaires, dont la formation a déjà été décrite,
  • Les trous noirs supermassifs, de plusieurs centaines de millions de masses solaires, dont on suppose l’existence dans le centre de nombre de galaxies.

On appelle ergosphère ou sphère photonique, la sphère correspondant à l’orbite limite des photons : en-deçà de cette limite, ils tombent inexorablement vers le trou noir. L’ergosphère a un rayon de 1,5 Rayons Solaires.

Un trou noir est dit actif s’il absorbe des particules ou des poussières en grande quantité. Il y a alors présence d’un disque d’accrétion qui entoure l’horizon du trou noir.

 

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4. Les phénomènes provoqués par les trous noirs

Le phénomène de lentille gravitationnelle est extrêmement fort aux alentours d’un trou noir. On sait qu’une masse assez importante peut courber l’espace-temps, et ainsi dévier même les photons. On a alors un phénomène de lentille gravitationnelle défini, en supposant une masse non-rotative, par le développement limité :

Illustrations d'un phénomène de lentilles gravitationnelles

 
Un autre phénomène lumineux est le décalage vers le rouge. Il est dû au fait que le temps dans un espace fortement courbé est ralenti par le facteur :

...où vlib est la vitesse de libération en ce point.

Comme l’espace est de plus en plus courbe à l’approche du trou noir, toute la physique est ralentie, même la lumière : on observe un décalage de la lumière vers le rouge, appelé décalage Doppler gravitationnel. On remarquera que le facteur de ralentissement tend vers l’infini quand la vitesse de libération tend vers c, c’est-à-dire à l’approche de l’horizon du trou noir. L’horizon d’un trou noir actif est donc bordé de rouge.

Un trou noir actif produit un rayonnement électromagnétique important, car les gaz et poussières constituant le disque d’accrétion peuvent atteindre des vitesses de près de 1/3 de la vitesse de la lumière. Les frottements qui ont lieu alors produisent un fort rayonnement, surtout dans les gammes X et gamma.

Le dernier phénomène majeur à proximité d’un trou noir est le phénomène de marées. Le trou noir est en effet tellement massique que la différence d’accélération gravitationnelle entre deux point induit une force de marée qui tend à étirer les objets passant à proximité d’un trou noir. Une étoile peut être ainsi disloquée en approchant d’un trou noir, libérant une grande quantité de gaz qui ira alimenter le disque d’accrétion. La force de marée est donnée par l’équation.

...où h est la longueur radiale de l’objet considéré.

 

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5. Modes de détection et preuve d'existence

Il faut savoir que toutes les observations visant à apporter la preuve indiscutable de l’existence des trous noirs concerne en fait les trous noirs supermassifs présents au cœur des galaxies. En effet, si l’on ne sait pas encore comment ils peuvent se former, on a beaucoup de preuves de leur existence, car les phénomènes qu’ils engendrent sont beaucoup plus violents et donc plus facilement observables.

On suppose qu’un trou noir supermassif est présent dans bon nombre de galaxies. Les télescopes et radiotélescopes qui ont permis l’observation des noyaux galactiques ont apporté beaucoup d’éléments surprenants.

On utilise le décalage des ondes électromagnétiques, dû à l’effet Doppler, pour calculer la vitesse des gaz et des objets stellaires proches du noyau d’une galaxie soupçonnée d’abriter un trou noir. Dans plusieurs cas, dont l’un des plus frappants est la galaxie M84, on observe une trace spectrale en « S », alors que des gaz immobiles auraient donné une trace verticale. Les régions rouges correspondent à un éloignement, et les régions bleues à un rapprochement ; on conclut à l’existence d’un mouvement de rotation extrêmement rapide autour d’une région de quelques années-lumières. Les calculs sur les équations de la gravité donnent des résultats exceptionnels: dans le cas de M84, le détecteur STIS (Space Telescop Imaging Spectrograph) du HST (Hubble Space Telescope) mesure des vitesses de l’ordre de 400 km.s-1, dans une région de 26 années-lumières de diamètre. La région centrale, correspondant au milieu du « S », devrait alors contenir une masse d’au moins 3.108Masses solaires.

D’une manière similaire, des calculs ont été faits sur les vitesses des étoiles centrales de notre galaxie, dont certaines ont été mesurées à plus de 1400 km.s-1 ; les dernières mesures (2000) donnent une masse de 2,6.106MO dans une sphère de rayon 105RO. Sagittarus A*, le centre de notre galaxie, serait donc un trou noir.

L’étude des phénomènes astrophysiques violents a aussi apporté beaucoup à la théorie des trous noirs. C’est en 1960 que le physicien Allan Sandage découvre un objet étrange, nommé 3C48, dont le spectre ne correspond à aucun objet connu. Il est de même nature que celui d’une nébuleuse (raies d’émissions), mais les raies ne correspondent pas. En 1963, on comprend la nature du spectre de 3C48 ; les raies sont les mêmes que celles d’une nébuleuse, mais fortement décalées vers le rouge, phénomène dû à l’effet Doppler cosmologique. 3C48 est en fait une source radio s’éloignant de nous à une vitesse de plus de 1/3 c, au rayonnement 10 000 fois plus important que notre galaxie, et pourtant un million de fois plus petite. On a depuis observé de nombreux objets similaires, toujours très lointains, qui furent nommés quasars (Quasi Stellar Radiosources).

Les quasars sont généralement observés dans des galaxies très perturbées, parfois sous l’influence d’autre galaxies très proches . Le meilleur modèle pour expliquer le fonctionnement des quasars est la présence d’un trou noir en rotation au centre du quasar. En effet, 40% de la masse des gaz du disque d’accrétion pourraient alors être convertis en rayonnement (contre 0,7% pour la fusion de l’Hydrogène). Plus généralement, les différents types de noyaux actifs de galaxies (Galaxies de Seyfert I et II, radiogalaxies) sont considérés comme des quasars vus sous des axes différents. En effet, on observe dans la plupart des cas deux lobes de matière radio-émettrice dus à des jets de particules provenant du noyau de la galaxie.

Si les astrophysiciens considèrent maintenant l’existence des trous noirs comme chose sûre à plus de 99%, on n’a pas encore apporté la preuve indiscutable de leur existence. Dans bien des cas d’observation, des modèles, certes extrêmement complexes et peu probables, peuvent être constitués pour expliquer les phénomènes observés sans l’intervention d’un trou noir. Dans d’autres, les incertitudes liées aux calculs complexes et aux approximation nécessaires rendent certains astrophysiciens méfiants par rapport aux résultats obtenus.

Cependant, certains phénomènes ont été modélisés, qui, s’ils sont un jour observés, apporteraient la preuve tant attendue.

Théoriquement, une étoile qui s’approche trop d’un trou noir se voit disloquée par les forces de marée. La libération soudaine des gaz entraîne un fort rayonnement. Cet événement devrait se produire une fois tous les quelques milliers d’années. L’observation de Sagittarus A* révèle la présence de tentacules de gaz perturbées qui pourraient bien être les restes d’une étoile disloquée. Si un tel rayonnement venait à être observé, il ne pourrait qu’être produit par un trou noir.

Un autre phénomène a été étudié, connu sous le nom d’effet de fronde. En effet, si un système binaire double vient à s’approcher d’un trou noir, l’une des étoiles peut être capturée, tandis que l’autre voit son énergie cinétique augmentée aux dépends de celle de sa compagne. Elle pourrait alors atteindre une vitesse de l’ordre de 10 000 km.s-1, vitesse qu’aucune configuration stellaire ne peut produire.

Le dernier phénomène étudié est la fusion de deux trous noirs, récemment modélisée à l’aide de supercalculateurs. Si deux trous noirs se rencontrent, ils finissent par fusionner, et les ondes gravitationnelles produites par un tel phénomène ne peuvent être attribuées à aucun autre phénomène connu.

L’étude des trous noirs, passionnant nombre de physiciens, a permis de grandes avancées en physique théorique ; les modèles des trous noirs ayant été formés dans le point de vue quantique ou relativiste, ils ont grandement contribué à la recherche d’une physique unifiée, que ce soit par la théorie des cordes ou par le modèle standard.

 

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6. Bibliographie
  • Pour la science, dossier Hors-série Juillet 1997 Les trous noirs
  • Ciel & espace, n°365 Octobre 2000 Trous noirs, comment les débusquer ?
  • Bulletin de l’Union des Physiciens n°593 (Avril 1977) et n°577 (Octobre 1975)
  • Stefen Hawkins, L’univers des faits aux théories
  • Frédéric Laliberté, Les Trous noirs www.fortunecity.fr/technopole/ordi/24
  • M. Gafen, Formation des trous noirs, http://pages.infinit.net/gafen
  • Sciences & vie n°987 Décembre 1999 Le choc des géants de l’espace
  • Sciences & vie n°1000 Janvier 2001 On a pesé le cœur de la Galaxie
  • La NASA et le HST pour les images et les commentaires les accompagnant

 

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